
Lucie Amir,
Politiques du polar
« Les fictions criminelles sont à l’évidence, dans le contexte contemporain, une littérature de professeurs et d’ingénieurs, de journalistes et de fonctionnaires. »
Genre littéraire plébiscité par un large public, le polar serait, de surcroît, viscéralement subversif: ce lieu commun domine les imaginaires depuis plus d’un demi-siècle. Mais qu’en est-il vraiment ? Le polar remplit-il effectivement une fonction de critique sociale, ou bien cette vision d’une littérature « de rebelles » relève-t-elle du fantasme ?
Répondre à ces questions implique de démêler l’écheveau complexe des rapports entre polar et politique. C’est à cette tâche que s’applique ici Lucie Amir. Analysant tant les œuvres des grands noms du genre que les discours et institutions qui les portent, elle propose une enquête méticuleuse sur son histoire et les tentatives de politisation qui l’ont concerné en France. Sa démarche souligne le caractère structurant des tensions entre les nécessités pratiques du polar (le divertissement et les contraintes éditoriales afférentes), son ancrage politique et sa valeur littéraire ; mais, aussi et surtout, elle met en évidence les polarités idéologiques qui structurent l’inconscient politique d’un genre bien moins homogène et « progressiste » qu’on n’a tendance à le croire.