« Qui sont les promoteurs du roman national ? Quels sont les mythes qui, hier et aujourd’hui encore, le soutiennent et structurent les représentations et les pratiques des élites dirigeantes, et celles de nombreux clercs devenus des scribes consciencieux ? »
1870. Les troupes de Napoléon III sont défaites par les armées prussiennes ; la France perd l’Alsace et la Lorraine. 1871. Les « Rouges » triomphent à Paris. Au terme d’une nouvelle guerre civile, la Commune est écrasée. Autant d’événements dramatiques pensés par les contemporains comme des preuves de décadence. Pour arracher le pays à cette situation, il est indispensable de refaire le corps social, politique et symbolique de la nation.
Les élites dirigeantes et universitaires de la Troisième République s’attèlent donc à la fabrication d’un extraordinaire roman national-républicain fondé, entre autres, sur l’invention de deux mythologies : l’« universalisme » et l’« exception » française. De là, aussi, la construction d’un puissant État éducateur et moralisateur, notamment voué à la domestication des classes « dangereuses ». Olivier Le Cour Grandmaison revient ici sur la genèse de ces mythologies, leurs reprises successives et leur fonction politique, hier et aujourd’hui, où des politiques, des historien·nes, des philosophes et des essayistes continuent d’exalter cette France fantasmée pour mieux occulter nombre de maux réels.